La reconnaissance de l’intérêt à agir contre un projet local d’une association dont le champ d’application est à l’échelle départementale : CE, 1er décembre 2023, n° 466492
Le Tribunal administratif de Toulon rejette la demande d’une association d’annuler pour excès de pouvoir d’un permis de construire délivré en vue de la création d’une zone d’activités, sans se prononcer sur la recevabilité.
L’association interjette appel devant la Cour administrative d’appel de Marseille, qui juge irrecevable la demande de première instance, faute pour l’association requérante de justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le permis de construire litigieux.
Selon la Cour, le projet autorisé, au regard de sa nature, du nombre de constructions, ainsi que du choix et des particularités de son lieu d’implantation, n’était pas susceptible de porter atteinte au cadre de vie dont l’association requérante entend assurer la défense et la préservation à l’échelle du département du Var.
L’association se pourvoit alors en cassation devant le Conseil d’Etat, qui doit se prononcer sur l’intérêt à agir de la requérante, compte tenu du champ d’action de l’association et de l’importance du projet.
Pour cela, la Haute juridiction rappelle tout d’abord que le projet litigieux consiste en la construction de trois bâtiments, totalisant une surface de plancher de plus de 7 100 mètres carrés et destinés à accueillir des activités artisanales et commerciales, puis souligne que l’objet statutaire de la requérante est d’assurer dans l’ensemble du département, ” la défense et la préservation du cadre de vie contre toute atteinte qui y serait portée par la planification ou l’autorisation de surfaces destinées au commerce “, notamment en veillant ” à la légalité des autorisations d’urbanisme portant sur des surfaces destinées au commerce, y compris celles ne nécessitant pas la saisine de la commission départementale d’aménagement commercial “.
Le Conseil d’Etat estime ainsi qu’ « en jugeant irrecevable la demande de première instance alors que l’association requérante justifie, eu égard à son objet statutaire et à la nature et l’importance des constructions autorisées, d’un intérêt lui donnant qualité pour demander l’annulation excès de pouvoir du permis litigieux, la cour administrative d’appel a inexactement qualifié les faits de l’espèce. ».
Rappelons qu’en principe, lorsqu’une association s’est donné un ressort d’action à l’échelle départementale (ou plus large), l’intérêt pour agir à l’encontre d’un projet se limitant à une commune n’est pas admis (à titre d’exemple : CE, 9 déc. 1996, n° 155477 ; CE, 25 juin 2003, n° 233119).
Toutefois, ce principe rencontre une exception dès lors que la décision contestée par l’association a une portée significative. En d’autres termes, si le projet mis en cause est d’une importance particulière, l’intérêt à agir de l’association peut être reconnu (à titre d’exemple : CE, 17 févr. 2010, n° 305871).
Ainsi, la présente décision participe à l’atténuation de ce principe jurisprudentiel d’irrecevabilité. Elle reconnaît qu’une association, opérant à l’échelle départementale, peut agir à l’encontre d’un projet local, à condition que ce dernier présente une importance significative.
Le Conseil d’Etat rappelle donc l’importance de la nature et de la portée du projet contesté dans la détermination de la recevabilité de l’action d’une association, au regard de son objet statutaire.
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